mercredi 30 juin 2010

Chapitre 27 - Mes Couleurs de l'Arc-en-Ciel -



 La 27ème chronique que vous vous apprêtez à lire est la dernière du 1er Tome de Parce qu'Eux.



Samedi 19 & Dimanche 20 Septembre




J’aurais tellement aimé que le temps ne passe pas aussi vite. Surtout pas ce jour-là. Surtout pas ce soir-là. J’aurais tellement aimé pouvoir me dédoubler et passer autant de temps avec tout le monde. Mais, comme ils disent dans Astérix, ‘avec des si on mettrait Lutèce en amphore’. Ils étaient tous là. Tous avaient fait l’effort de se déguiser selon le code vestimentaire très strict (vêtements flashy à outrance), tous étaient venus avec du champagne et un cadeau. Jamais je n’aurais pu imaginer une telle fête d’anniversaire. Il y avait des sourires, des rires, des verres renversés (quelle soirée n’a pas son lot de verres renversés ?), des trucs succulents à manger, une musique décoiffante (Hedi officiait en tant que dj) et une décoration du tonnerre. Des guirlandes arc-en-ciel accrochées aux quatre coins du salon, des reproductions de tableaux d’Andy Warhol aux murs, des tissus fluo recouvrant les canapés. Bon, je dois bien avouer qu’une trop longue exposition à cette décoration pouvait avoir des effets néfastes sur les personnes épileptiques mais pour le moment, personne n’avait encore eu un quelconque problème de ce genre. Et ce temps, ce temps qui filait. Malgré le fait que je passais une soirée inoubliable et que la musique était plutôt forte, j’avais l’impression d’entendre chaque minute défiler. Ah oui, même David Bowie était déguisé, c’est dire !
« Alors darling ? Heureux ?
- Oui...Franchement je ne sais pas quoi dire... C’est magnifique ce que vous avez fait... Je n’ai jamais vu mon appartement aussi beau. Ni mon chat d’ailleurs...
- Contente que ça te plaise alors. Si après ça tu ne captes toujours pas qu’on t’aime alors là je ne m’appelle plus Norma. On a eu sacrément comme mal à lui mettre ce satané ruban autour du cou à ton matou en parlant de ça ! Et mes cupcakes alors ? Tu les trouves comment ?
- Délicieux. Un petit goût de paradis à chaque bouchée.
- Tu en fais un peu trop là.
- Non, vraiment ils sont excellents.
- Bon, je dois avouer que Thad m’a bien aidée.
- Ah ça, il est super doué en cuisine.
- Bon en fait, pour dire la vérité, je lui ai donné les directives et il a exécuté.
- Ah ouais ? Donc, en gros t’as rien foutu ! Ah, ah, ah, il n’y en a pas deux comme toi ma Norma. Thad ? Viens voir s’il te plait.
- Oui ? Tu t’amuses bien Simon ?
- Oui c’est franchement génial et tes cupcakes sont vraiment divins.
- Oh, c’est gentil, mais je n’ai pas fait beaucoup. Norma a tout fait et moi...
- Te fatigue pas, je lui ai dit la vérité.
- Ah, ok... Content que tu aimes ma recette en tout cas. Enfin c’est celle de ma mère, elle me l’a envoyée par mail.
- Quoi ? Ah, parce que c’est la recette de ta mère ?
- Oui. Pourquoi ?
- Ah, je file Simon, Sara me fait des grands signes là. Je ne voudrais pas la faire attendre.
- Ouais c’est ça, pars avant que j’apprenne qu’en fait tu n’as même pas participé à la déco. Si ça se trouve même, ce n’est pas toi ce soir. T’as peut-être engagé un sosie bas de gamme. Je trouve que tu as un truc différent. Oh et puis allez, je t’aime quand même.
- Moi aussi mon Simon. Ah non, avant que j’aille voir Sara. Thad, tu as réfléchi à ce dont on a parlé quand on faisait mes cupcakes ?
- Ses cupcakes.
- Oui, ok, ses cupcakes. T’as réfléchi alors ?
- Qu’est ce que vous avez manigancé ? Thad, tu sais, il ne faut pas te laisser faire.
- Darling, t’as pas un truc à faire là ? Regarde Boris a l’air de s’emmerder ferme avec André et Joseph. Tu devrais aller le divertir.
- Non, non, pas avant de savoir ce que c’est que ce truc dont vous avez parlé. Alors ?
- Je dois dire que je me souviens plus.
- Mais si, tu sais ! Ah la, la ces américains et leur mémoire de poisson rouge. Le truc que tu dois faire.
- Ah oui, le truc. Of course !
- Vous êtes niais tous les deux, c’est effrayant. Les Minus et Cortex du pauvre. Ce soir c’est mon anniversaire alors vous devez tout me dire ! Vous préparez quoi ?
- Bon Norma, tu fais quoi ? Ça fait trois plombes que j’agite les bras et tu fais style tu me calcules pas.
- J’arrive Sara. J’ai un truc à régler avant.
- Ta fête déchire Simon. Après on fait un action/vérité dans ta cuisine, vous êtes partants ?
- Ouais, ouais, c’est ça. J’arrive je te dis. Allez ouste !
- Excuse-la, elle est en plein plan machiavélique. Elle va arriver.
- Ok, ok. Oh mais ton verre est vide, attends je vais t’en rechercher un. Tu veux quoi ?
- Du champagne s’il te plait. Sans rien, nature.
- Putain, j’ai cru qu’elle n’allait jamais partir.
- Tu devrais parler encore plus fort. C’est vrai que mon appart c’est Versailles avec des murs en acier trempé. La discrétion et toi, vous n’êtes pas passées par la même porte. Alors ? C’est quoi cette histoire foireuse d’avance ? Arrête ton suspense à deux balles !
- Alors mon chéri tu t’amuses bien ? Tu viens un peu avec moi, je me sens tout seul.
- Oui, tiens Boris, emmène ‘ton chéri’ avec toi, il me gêne là.
- J’arrive. Tiens, tu peux aller demander à Hedi de mettre la musique qu’il a mise la dernière fois ?
- Florence and the Machine ?
- Oui, c’est ça ! J’arrive tout de suite.
- Bon, accouche maintenant ! Parce qu’à ce rythme là, dans trente secondes c’est Clara qui va débarquer et ainsi de suite.
- Justement, c’est de Clara qu’il s’agit.
- Je sens le truc à la noix arriver. Et donc ? Continue.
- J’ai chargé Thad de séduire Clara.
- T’as pas trouvé pire idée ?
- Ça me semble être une bonne idée moi.
- Tu en penses quoi Thad ?
- Je ne sais pas vraiment.
- Mais oui tu sais, tu m’as dit que tu voulais bien !
- J’ai pas dit ça, j’ai dit pourquoi pas ! Tu transformes les choses toi. Tu aimes ça !
- Norma t’es folle. Tu crois que ça va l’empêcher de prendre son avion ça.
- Ben oui. Thad est cool et beau mec. Ça peut marcher.
- C’est nul. Thad je t’interdis de faire ça.
- J’ai pas très envie de toute façon.
- Sale lâcheur ! Je comprends pourquoi on dit qu’il faut se méfier des américains... Tout s’éclaire maintenant...
- Désolé Norma mais Clara est jolie mais pas trop mon style.
- Laisse tomber, j’ai compris t’es 100% pédé. Je vais trouver autre chose, pas grave. Bon, en attendant, je vais voir Justin moi.
- Ben voilà, t’as qu’à demander à Justin de coucher avec Clara. Et hop, le tour est joué !
- Ah. Ah. Ah. Je suis morte de rire.
- Faut pas que tu obéisses aux ordres de Norma toi. Même si je sais qu’elle adore ça. Résiste !
- Je voulais lui faire plaisir c’est tout. Et cet après-midi, ça ne me dérangeait pas mais ce soir, j’ai réfléchi et c’est autre chose. Oh, j’adore cette chanson. C’est ça Florence and the Machine ?
- Oui, oui c’est ça. Moi aussi j’adore. Je sais ce qu’il y a ce soir, tu sais.
- Ah oui ? Tu sais quoi ?
- C’est Hedi, c’est ça ? Ça se voit comme le nez au milieu de la figure.
- Oui. Mais je ne devrais pas.
- Pourquoi ? Ça peut durer le temps que ça durera et ça peut être magique. Tu ne crois pas ?
- Non, tu as raison. Ça a déjà été magique mais il veut quelque chose de sérieux et moi je ne sais pas ce que je veux.
- T’as vu comment il te regarde depuis tout à l’heure ? T’es même pas allé lui parler. Même pas un comment ça va ou tu veux boire un truc ?
- Tu as remarqué tout ça ? Comment tu as fait, tu étais tout le temps occupé avec les autres ?
- On m’appelle l’œil de Moscou. Mais chut c’est un secret et je ne voudrais pas re-déclencher une guerre froide entre ton pays et le mien.
- Ah ok ! Je suis vraiment content de te connaître tu sais même si tu es un sale russe ! Ah ah ah.
- Oh, c’est pas le moment des grandes déclarations là ! Va le voir, parle-lui et sois heureux. Même si c’est pendant une soirée, on s’en fout ! Et même si c’est pendant une heure ! Ne pense pas au reste et moi, je vais retrouver mon amoureux. »


Il était presque 1h du matin. Déjà. J’avais encore tellement de choses à faire. Le mieux aurait été que je n’aille pas me coucher ou que je repousse ce moment au dimanche soir... Je ne voulais pas que cette soirée s’arrête. La vie serait belle si on pouvait passer son temps à boire du champagne avec ses ami[e]s en écoutant Florence and the Machine. Vous ne trouvez pas ?
« Franchement, ta soirée est fa-bu-leu-se. Au départ, je me suis dit qu’on allait s’ennuyer un peu mais en fait non ! C’est din-gue !
- Merci André c’est cool si tu t’amuses bien. Mais pourquoi tu te serais ennuyé ?
- Je ne sais pas. Je me suis dit une soirée à Rouen ça va craindre un chouïa.
- On s’amuse bien à Rouen tu sais. Autant qu’à Paris je crois. Enfin, il suffit d’être entouré des bonnes personnes et c’est gagné ! Et ici, il n’y a que des bonnes personnes.
- Ouais mais ça c’est l’élitisme d’André, tu ne pourras jamais en venir à bout.
- Oh c’est bon Joseph, tu ne vas pas commencer. C’est toujours la même chose avec toi, tu a-do-res montrer mes petits travers histoire qu’on s’occupe de toi.
- Mais là, il n’a pas tort. Tu ne peux pas t’empêcher de te la jouer Parisien pure souche alors que si je me souviens bien tu...
- Oh bon, ben voilà, vous avez tout gagné ! Merci Boris. Moi je vais bouder. Je ne cautionne pas du tout cette cabale envers moi ! Mais alors pas du tout.
- Reviens André ! On rigolait là !
- Et ben c’est pas marrant. Je vais dans la chambre d’ami, j’ai la tête qui tourne de toute façon.
- Euh attends... Non André !
- Quoi ?
- Je crois qu’il ferait mieux d’aller ailleurs que dans la chambre d’ami...
- La dernière fois que j’ai vu la porte s’ouvrir, c’était parce que Thad et Hedi y rentraient... et pas pour parler macramé si vous voyez ce que je veux dire.
- Ah parce qu’ils sont à nouveau ensemble ces deux là ? André va en faire une jaunisse...
- Tu crois ? Il n’a toujours pas fait son deuil ?
- Je crois qu’en effet on peut dire ça comme ça. Il m’en parle tous les jours, je n’en peux plus. Des fois, je préférerais être picoré par des pigeons plutôt que d’entendre encore parler de Thad. Et les chemises de Thad. Et le sourire de Thad. Et la guitare de Thad. Et le torse imberbe de Thad. Bla, bla, bla. Achevez-moi sur le champ !
- Joseph t’es courageux quand même, j’admire.
- Ouais, je mériterais une putain de médaille pour services rendus à la nation. Oh merde le revoilà.
- Ça va André ? T’es tout pâle.
- Oui et j’ai de bonnes raisons ! Non mais ! Le monde entier je vous dis ! Même ces satanés amerloques sont contre moi !
- Viens on va aller prendre un peu l’air. Ça ne pourra pas te faire de mal.
- Ouais ben embarque une bouteille tant que tu y es, j’ai besoin d’un remontant !
- Il a l’air vraiment accro à Thad. Ça fait peur.
- Il va où André ?
- Il est sorti prendre l’air, il a constaté que Thad et Hedi s’étaient remis ensemble.
- Oh mais c’est génial ça ! Et sinon ça va vous deux ? Ça roucoule sec ?
- Oui, on n’a pas à se plaindre. Et toi ma sœur adorée, tu t’amuses bien ?
- Je dois dire que ça faisait fort longtemps que je n’avais pas passé une aussi bonne soirée. Bien cool, pas de prises de tête et pas d’excès à la noix. Ça fait plaisir. Ah oui, sinon, je viens vous chercher. Sara va commencer son action-vérité.
- Je ne suis pas super motivé. J’ai passé un peu l’âge. J’ai 26 ans maintenant ! Il ne faudrait pas l’oublier ! Je suis un être respectable ! Et puis je voudrais voir un peu Clara avant qu’elle ne s’en aille. Je ne l’ai presque pas vue de la soirée.
- Comme tu veux ! Après tout, c’est toi le Roi de la soirée !
- Ravi de te l’entendre dire Eléanore. Mais vas-y Boris si tu veux.
- Je vais aller voir Virgil. Je ne sais pas ce qu’il raconte depuis tout à l’heure à Norma et Justin mais je serais curieux d’entendre ça. »

Dire que je n’avais presque pas vu Clara de la soirée est un euphémisme. Durant les premières minutes, je l’avais aperçue se déhancher sur du Lady Gaga, puis j’avais été emporté dans le tourbillon de mes ami[e]s qui voulaient tous me parler, m’embrasser, me prendre dans leurs bras, me servir à boire, m’offrir leurs cadeaux. Je l’avais bien vue fumer une clope à la fenêtre de la cuisine un verre à la main un peu plus tard et plus rien depuis cet instant. J’avais pourtant encore beaucoup de choses à lui dire. Déjà, que je l’aimais. Je ressentais ce besoin presque vital de lui assurer qu’elle comptait énormément pour moi malgré mon impatience et mon agacement à son égard ces derniers temps. Je ne lui avais jamais dit je crois. J’étais con des fois.
«  Excuse-moi Marjorie, t’as pas vu Clara ? Je n’arrive pas à la trouver.
- Je crois qu’elle est descendue chercher un truc dans son appart’.
- Ah ok. Merci. Ça va sinon, tu t’amuses bien ?
- Oui, c’est vraiment une pure soirée. Par contre, je ne vais pas tarder à y aller, je dois rejoindre mon copain à une autre soirée. Tu ne m’en veux pas ?
- Non, non pas du tout ! Je ne savais pas que tu étais à nouveau avec quelqu’un. C’est une bonne nouvelle ça !
- Ben c’est mon ex en fait. Axel, tu te souviens de lui ?
- Ah oui, j’ai dû le voir une fois. Un grand brun c’est ça ?
- Oui c’est tout à fait ça.
- Bon on reparle de tout ça plus tard, je vais essayer de mettre la main sur Clara.
- Ok, ok. Et encore bon anniversaire Simon !
- Merci Marjo, c’est adorable. Ah André, tu te sens mieux ?
- Non. J’en ai marre d’être tout seul. Je me sens nul, moche et i-nu-ti-le. Bref. Joseph, va me chercher un morceau de gâteau s’il te plait. Je vais m’asseoir, manger et devenir énorme !
- Allez, c’est la fête ce soir ! Amuse-toi. Au moins pour me faire plaisir.
- J’ai plus envie là. Plus du tout envie. J’ai plus le goût à rien... Enfin sauf au gâteau...
- Je dois faire un truc là mais quand je reviens, on en discute. D’accord ?
- Si je ne suis pas mort étouffé par la quantité industrielle de gâteau que je vais m’enfiler, je serai toujours affalé sur le canapé. »
A force de dire à tout le monde que j’allais revenir et discuter avec eux, je crois bien que la soirée allait se prolonger un long moment. J’aurais dû prendre mon agenda histoire de noter tous ces nouveaux rendez-vous. La porte de l’appartement de Clara était entrouverte. Pas un bruit. Juste une petite lampe allumée et une cigarette se consumant dans le cendrier.
« Clara ? T’es là ?
- Dans la chambre. Ah c’est toi ! Qu’est ce que tu fais là ? Tu ne vas quand même pas louper ta soirée.
- Et toi alors ? Tu ne t’amuses plus là-haut ?
- On va dire que j’ai la tête un peu ailleurs. Et puis je ne me sens pas super à l’aise ce soir.
- Pourquoi ? Quelqu’un t’a dit quelque chose ?
- Non, non. Mais laisse tomber, je fais juste mon Simon là.
- Oui, je vois que la paranoïa te gagne. T’as fini tes bagages ?
- Oui. Enfin je n’embarque pas grand-chose de toute façon... J’ai peur Simon tu sais.
- Je sais. Tu peux encore faire machine arrière, il n’est pas trop tard.
- Non, j’ai besoin de partir. J’en ai marre d’être ici, de ne rien faire de ma vie.
- Tu ne fais pas rien de ta vie, ne dis pas ça.
- Je sature. Je ne sais pas pourquoi l’Inde mais après tout, pourquoi pas ? Je crois même que je ne vais pas aller à Goa. J’ai pas envie de déranger Pierre. Faut que j’apprenne à faire sans lui. Il est grand temps.
- C’est peut-être pas plus mal en effet. Tu vas aller où alors ?
- Bombay d’abord et ensuite j’improviserai. Et puis Sultana m’a donnée pas mal de tuyaux ce soir. C’est cool que vous l’ayez invitée. Elle m’a même dit d’aller voir sa tante de sa part. Elle pourra m’héberger les premières nuits.
- Elle ne t’en veut donc pas pour le sari ?
- Elle ne m’en a pas parlé à vrai dire. Peut-être qu’elle n’a pas réalisé que c’était moi la folle au fer à repasser... Et si ça ne marche pas là-bas ? C’est ça qui me fait peur en fait. Si je vais là-bas pour rien ?
- Tu verras une fois arrivée. Mais je crois que jamais tu ne ferais un tel voyage si ça ne t’apportait pas quelque chose. Même un truc, un enseignement. Et puis, si vraiment, ça ne va pas, tu reviendras et on sera là. On t’aidera.
- Ouais mais j’en ai marre qu’on m’aide. J’en ai marre d’être ce genre de fille.
- Arrête. Allez, viens là. J’ai envie de te faire un câlin.
- Merci mon Simon. T’es trop mignon tu sais.
- Chut... Je t’aime ma Clara... Tu vas me manquer...
- Toi aussi tu vas me manquer. Qui va me divertir maintenant avec des ragots inutiles qui deviennent super importants lorsque tu les racontes ? Qui va faire ça maintenant ?
- J’espère que je ne sers pas qu’à ça quand même.
- Mais non. Evidemment que non. Mais le reste je le garde pour moi, tu te la pètes assez comme ça ce soir.
- D’ailleurs, on y retourne ? Ils vont finir par se demander où le King de la Party est parti.
- Ok mais tu restes avec moi. Du moins, à proximité.
- Ecoutez la, la capricieuse de service. Mais oui, je ne vais pas te lâcher d’une semelle. Et pourquoi tu ne flirterais pas avec Andreas le pote de Justin ? Il est canon non ?
- Mais c’est bien ça le problème ! Il n’y a que des canons à ta soirée. On dirait une pub Dolce&Gabbana. Les filles banales dans mon genre n’y trouvent pas leur compte !
- Tu exagères ! Aucun des garçons présents n’est musclé comme un bœuf. Et puis qu’est ce que j’y peux si j’attire les garçons craquants ? C’est mon fardeau et je fais avec. Mais c’est pas tous les jours facile, crois-moi.
- Pauvre chou... Bon par contre, André lui, il est vraiment vilain.
- Ça c’est pas très sympa ! Surtout qu’il déprime ce soir le pauvre André.
- Ben pourquoi ? Il s’est regardé dans un miroir et il a 
compris ?
- Garce ! Ton humour de bitch va sacrément me manquer aussi ! »


« Quelqu’un veut encore du champagne ? Je viens de rouvrir une bouteille.
- Ah oui, je veux bien. Merci Boris. Ça va bien ?
- Ben oui, ça va tranquille. Et vous ? Vous racontez quoi de beau ?
- Virgil nous raconte son dernier voyage aux Etats-Unis. Et Justin est comme un fou parce qu’il rêve d’y aller.
- Je ne suis pas comme un fou. Je suis juste intéressé.
- Salut moi c’est Boris. Je crois qu’on n’a pas été présentés ou alors j’ai déjà trop bu.
- Ah oui, excuse-moi, quand Andreas est arrivé, tu étais en train de discuter avec Simon. Donc voilà, Andreas, et ça c’est Boris, le copain de Simon.
- Enchanté Boris. Très jolie fête et super appart ! Et la déco est vraiment pas banale...
- Merci. Mais rassure-toi, ce n’est pas toujours comme ça. C’est plus sobre d’ordinaire.
- Et Simon, il est où ?
- Oui c’est vrai ça, il est où ?
- Il est parti chercher Clara. Il avait des trucs à lui dire.
- Ah ouais ? Quel genre de trucs ? Je devrais peut-être aller les voir.
- Non Norma, je t’assure ça va le faire. Bon et alors, Virgil, tu racontais quoi ?
- Ma semaine de fou à Miami en 2006. Je ne sais même pas comment je fais pour me souvenir de tout vu le nombre incommensurable de prods que j’avais pris ! D’ailleurs, en parlant de ça, c’est dommage que Félix n’ait pas pu venir, on aurait bien trippé avec lui.
- C’est peut-être pas plus mal tu sais. Simon n’est pas fan de ce genre de trucs. Et Félix n’est pas forcément quelqu’un que j’affectionne.
- C’est juste que tu le connais mal. Et puis un petit quelque chose de temps en temps ça ne peut pas faire de mal.
- Ouais... Je ne sais pas...
- Pourtant tu savais à une époque.
- Ouh la, attention, dossier dossier. Racontez tout à Tata Norma !
- Non, non, ça va, Tata Norma n’a pas besoin de savoir. Ça va aller. Et puis de toute façon, il n’y a rien à savoir !
- Vous n’êtes pas drôles les mecs. Ah ! Qui a mis ça ? Miley Cyrus c’est beaucoup trop pour mes pauvres petites oreilles. André, c’est toi ?
- Quoi moi ?
- Cette daube là ! C’est toi le responsable ?
- Oui. Oh, s’il te plait, juste une chanson. Trois minutes et c’est fini. Je l’adore cette fille !
- Ok, ok. T’as du bol que Simon ne soit pas là... Je sens que ça va être les trois minutes les plus longues de toute ma vie. Andreas tu serais un amour si tu allais me chercher un cupcake dans la cuisine. Tu veux bien ?
- Pas de problème. J’avais envie d’aller m’en chercher un. T’en veux un à quoi ?
- Framboises s’il te plait. Et une petite serviette aussi.
- Il est vraiment gentil cet Andreas. Et quel prénom sex...
- Surtout parce qu’il te rend service.
- Pfff. Il faut bien que quelqu’un le fasse puisque tu ne veux déjà plus le faire pour moi. C’est la mort de notre couple. Tu ne m’obéis déjà plus.
- Mais oui, c’est ça. Bon vas-y Virgil continue ton histoire. T’en étais au moment où t’es allé dans ce club là.
- Ouais le Bash. C’était mémorable ! Il y avait une grosse soirée et un défilé de mode. J’ai failli pas rentrer parce qu’il trouvait que je n’étais pas assez bien habillé. En fait c’est surtout mes baskets qui les gênaient. Il a fallu que je les enlève pour leur montrer que c’était des vraies Dior. C’était bien trippant !
- Putain, il y a de l’ambiance dans la cuisine. Les filles font un action-vérité. Enfin... surtout un vérité-vérité. Vous n’avez pas envie d’aller y faire un tour ? Ça pourrait être marrant non ?
- Ouais... Je n’étais pas très motivée tout à l’heure mais je crois que je vais t’accompagner Andreas. Je vais laisser les deux kékés à Miami. Tu viens avec nous Boris ?
- Oui, pourquoi pas. A plus les gars. Et ne rêvez pas trop parce que demain matin, vous risquez d’avoir sacrément mal aux cheveux. »


« Tu crois vraiment que j’ai bien fait ? It was awesome you know. Jamais comme ça avant.
- Je crois que la fin de ta phrase répond à ta question.
- Non mais c’est évident ! Vous êtes faits l’un pour l’autre, ça se voit dans la lueur de vos yeux.
- La lueur de leurs yeux ?
- Ouais.
- Putain, avant même d’avoir mis un pied en Inde, t’es déjà mystique Clara. Fais gaffe !
- Non mais c’est vrai. C’est un truc que j’ai déjà remarqué chez d’autres personnes. Ben chez mon cousin par exemple. Bart ! Enfin, Barthélémie. Avec son ex, c’était trop ça !
- Ton cousin est gay ?
- Non ! Pourquoi vous les gays vous croyez que tous les mecs sont comme vous ? C’est pas une critique mais c’est lassant. Bref, lui et sa copine ils avaient un truc de fou dans les yeux.
- Et ça c’est fini quand même ?
- Ben ouais, mais ça c’est une autre histoire. Elle était cinglée ! Ah c’est ça que je vous ai pas dit, mais l’appelez jamais Bart, il déteste ça. Mais vraiment ! Là, c’est lui qui deviendrait complètement cinglé.
- T’en fais un peu trop non ? Dis qu’il se transforme en Hulk tant que tu y es...
- Non, non, je t’assure. En fait il hait les Simpsons donc pas de Bart s’il vous plait.
- On tâchera de s’en souvenir. Mais comment on peut haïr les Simpsons ? Bref... Ah revoilà Hedi !
- Honey, je n’ai pas réussi à trouver ceux à la framboise alors je t’ai pris le dernier cupcake au nutella. Ça te va quand même ?
- Oui c’est parfait. Thanks.
- Vous êtes mignons tous les deux.
- Il faut changer de disque, vous n’arrêtez pas de le répéter depuis tout à l’heure !
- A cette heure-ci, on ne fait plus que répéter les évidences, désolé !
- Putain, j’en pouvais plus ! Deux heures d’action-vérité c’est inhumain.
- Je le savais, je t’avais prévenue Norma.
- Non mais là, vous ne vous rendez même pas compte de ce que j’ai pu dévoiler. Je vais partir avec toi Clara je crois. Faut qu’on m’oublie par ici.
- C’était si trash ?
- Pire ! Je suis foutue... Je dois quitter le pays.
- Norma, toujours dans la retenue.
- Non mais, sérieusement, ces filles ce sont des harpies, une unité d’élite spécialement entraînée pour faire style je raconte plein de trucs ultra personnels sur ma life alors que rien du tout. Des clous ! C’est moi qui ai tout raconté. J’ai tout ba-lan-cé ! Et voilà que je parle comme André maintenant ! Je suis définitivement foutue...
- Juste parce que t’adores parler de toi, c’est tout !
- T’as quand même pas raconté le truc de la chambre d’hôtel ? Rassure-moi.
- Si... Mais je ne veux pas trop en parler.
- Ouais, c’est ça... T’as trop parlé déjà... C’est mort !
- Quel truc de chambre d’hôtel ?
- Rien. C’est juste entre Simon et moi.
- Allez, vous pouvez faire une exception pour moi.
- Non Clara. Je suis désolée.
- Demain je serai partie. Enfin, même pas demain, dans quelques heures. C’est le moment ou jamais.
- Ben ça sera jamais ! Tu ne m’attendriras pas comme ça. Putain j’ai tellement honte... Et regarde-les maintenant, trop fière de m’avoir fait avouer tous ces secrets inavouables.
- Inavouables ? Carrément ? A ce rythme-là, t’es prête pour être la nouvelle voisine à Wisteria Lane.
- Tu sais Hedi, je ne suis pas sûr que ce genre de secrets soit très vendeur... Mais je n’en dirai pas plus...
- Ouais, j’apprécierais en effet... Vous savez quoi les amis ?
- Non, quoi ?
- Je crois que je vais aller me coucher. Mettre la viande dans le torchon comme on dit chez les beaufs !
- Elégant... Mais pas déjà quand même ? Il n’est que 5h...
- C’est vrai ça, il n’est pas tard.
- Ça veut dire quoi la viande dans le torchon ?
- Je t’expliquerai plus tard Thad. Mais sincèrement, c’est comme les secrets de Norma, il ne vaudrait mieux pas que tu saches.
- Je suis levé depuis une éternité, je suis sur les rotules et en plus Justin est déjà parti.
- Sympa pour nous...
- Ouais moi aussi je vais y aller. Je me lève dans trois heures, c’est horrible. Par contre, on se fait un bisou et c’est tout. Pas envie d’adieux qui vont tous nous faire pleurer. Ça serait con de finir une telle soirée comme ça.
- Tu vas faire attention à toi, tu me le promets ?
- Mais oui Simon, je te le promets. On ne dirait pas comme ça, mais je commence enfin à être une grande fille. »

Puis elle est partie. Non sans quelques larmes. Nous ne sommes que des êtres humains après tout. Et voilà, nous n’étions plus que quatre. Quatre garçons un peu défaits, un peu cernés, un peu échevelés mais toujours dans le vent.
« En fait, on n’a pas beaucoup dansé ce soir.
- Parle pour toi Boris. Moi je n’ai pas arrêté.
- Tu as quand même fait une grosse pause d’une heure pour faire autre chose, je me trompe ?
- Je ne vois pas du tout ce que tu veux dire...
- C’est vrai que j’ai pas beaucoup dansé ce soir. C’est con la musique était vraiment cool pourtant. Merci Hedi d’ailleurs. C’est grâce à toi.
- Content que ça vous ait plu. Je te mettrai la zic sur ton pc si tu veux. Tu danses bien Simon ?
- Ouais ça va. Je me débrouille.
- On va dire qu’il a une manière très personnelle. Tu ne te souviens pas quand on était aux Tuileries le mois dernier ?
- Non, ça ne m’a pas marqué.
- Dommage, tu aurais constaté à quel point sa technique est avant-gardiste.
- Je sens de l’ironie dans cette phrase... Mais je ferai comme si de rien n’était... C’est fou, mais ce soir j’ai eu l’impression de ne faire que des mondanités.
- C’est ça quand on est la star du soir. Il y a des obligations, des devoirs.
- Je n’ai pas vu le temps passer et en même temps j’avais conscience qu’il filait à une vitesse folle. C’est bizarre.... Je ne voulais pas que ça s’arrête. Pourquoi faut-il toujours que les choses les plus merveilleuses soient aussi les plus éphémères ?
- Ouais c’est un peu comme un jour de mariage. On attend ça pendant des mois, des années même et puis pouf, ça passe en moins de temps qu’il ne faut pour dire ‘cette pièce montée a vraiment une couleur douteuse’... 
- En parlant de mariage... enfin non ça n’a rien à voir du tout, pourquoi je dis ça moi ?...Vous avez vu la bague que Boris m’a offert aujourd’hui ?
- Oui, j’avais remarqué mais j’osais pas demander...
- Vous allez vous marier ?
- Non, non, c’est juste une bague.
- Enfin, juste une bague, elle vient tout de même de ma grand-mère.
- Tu as été sacrément gâté ce soir dis donc !
- Grave ! Merci encore une fois Hedi pour ces Converse, je ne vais plus les quitter. J’adore cette couleur !
- Bon et sinon, revenons aux choses sérieuses.
- Quoi donc ?
- Norma.
- Oui Norma ? Mais encore ?
- Cette histoire d’hôtel. C’est quoi ce truc ?
- Oui c’est vrai ! Dis-nous !
- Non, je ne peux pas. J’ai promis... Elle a trop honte.
- Qu’est ce qu’elle a fait ?
- Non, je suis désolé, j’ai promis.
- T’es pas marrant Simon. On est entre nous. Juste tous les quatre. On ne le répétera pas. Hein, on ne le répétera pas ?
- Of course.
- Evidemment ! Allez mon chéri, je n’en reviens pas qu’il y ait encore des secrets dans notre couple. Tu me déçois...
- Tu essayes trop de jouer sur la corde sensible là... Bon, ok. Mais vous me jurez que vous ne le répéterez pas ? Jamais !
- Oui je te jure.
- Moi aussi.
- Pareil.
- Non Boris, dis Moi aussi. Pareil ça ne compte pas.
- Moi aussi mon chéri. C’est bon là ?
- Je vais vous donner les faits et c’est tout. Vous ne poserez pas de questions, ok ?
- D’accord.
- Vous êtes sûrs qu’André, Joseph et Virgil sont vraiment endormis ?
- Affirmatif ! Allez, hop, balance le dossier !
- C’était en mai 2007. Beyoncé était en concert à Paris.
- Jusque là, rien de bien palpitant...
- Norma a réussi par je ne sais quel moyen à s’introduire dans sa chambre d’hôtel pour lui crier tout son amour.
- Oh non... Comment elle a fait ?
- Dans la chambre d’hôtel de Beyoncé ? La Beyoncé ?
- Non, non, ma tante Beyoncé qui vit à la Bourboule ! Ben oui la vraie Beyoncé ! Et donc, elle a été attrapée au bout d’une minute. Evidemment. Mais elle a quand même eu le temps de lui sauter au cou pour lui faire un bisou sur la joue.
- Tu déconnes là ?
- Elle était un peu folle à cette époque. Un peu déchaînée. Genre Taz mais en moins poilue.
- Pire que maintenant ?
- Oui. Maintenant elle est calme.
- Et ça s’est fini comment ? J’y crois pas à cette histoire.
- Hallucinant !
- Elle a été arrêtée. Ils l’ont relâchée aussitôt mais il y a eu un jugement disant qu’elle n’a plus le droit de s’approcher de Beyoncé à moins de 200 mètres.
- Même des cd de Beyoncé ?
- J’ai envie de rire là. Ça parait tellement énorme. J’imagine la scène !
- Ben ne te gêne pas. Moi aussi à chaque fois que j’y pense j’ai envie d’éclater de rire mais Norma, elle ça ne la fait pas rire. Mais alors pas du tout. C’est pour ça que pas un mot sinon elle me tue !
- T’inquiète je te protégerai. On te protégera tous ! Et au pire on fera en sorte qu’un jugement dise qu’elle ne peut plus t’approcher à moins de 500 mètres ! Allez hop !
- Ça me ferait chier quand même.
- J’imagine. Qu’est ce que tu ferais sans ta petite Norma d’amour ?
- Pas grand-chose en effet. Mais d’une manière générale, je crois bien que je ne ferais pas grand-chose sans vous tous. A des degrés différents bien sûr mais vous êtes tous primordiaux dans ma vie.
- C’est une vraie déclaration là !
- Oui, une vraie, belle et sincère déclaration d’amitié. Je m’en étais rendu compte avant bien sûr, je ne suis pas miro à ce point mais ce soir, j’ai réalisé que ma vie avant vous tous, elle n’avait pas grande allure. Elle ne ressemblait à rien même... J’arrive encore à faire de jolies phrases malgré l’heure. Il est presque 6h du mat’ et je suis toujours debout et frais ! Je ne le crois pas !
- Tu es un nouvel homme Simon !
- Ouais, si seulement... »

En fait, en y réfléchissant cinq minutes, comme ils avaient fait ce soir pour rendre mon appartement aussi magnifique et coloré, mes ami[e]s avaient mis des petites touches de couleur partout dans ma vie. Du turquoise comme les baskets que m’avait offertes Hedi. Du rouge orangé comme cette magnifique robe que portait Norma le soir où j’ai rencontré Justin. Du Jaune comme les pancakes divins de Thad un dimanche midi. Du vert, un vert profond et lumineux à la fois, comme les yeux de Pierre. Du rose fuchsia comme le magnifique sari que Clara avait ruiné. Du doré comme les nombreuses bouteilles de champagne qu’avait ramenées Virgil ce soir. Et puis, un peu de bleu, de jaune et de vert comme les trois salles de bain d’Eléanore. Du rose tendre et pâle comme la chemise préférée d’André. Et enfin, du violet comme les draps dans lesquels j’avais passé ma première nuit avec Boris et comme cette marque qu’il avait laissée au creux de mon cou cette première nuit après un fougueux et long baiser.
Grâce à toutes leurs couleurs, j’avais maintenant mon petit arc-en-ciel personnel et pour rien au monde, je n’aurais échangé ça. Tout semblait tellement plus beau et simple depuis qu’ils étaient arrivés.

Alors une dernière fois, Norma, Clara, Pierre, Hedi, Thad, Virgil, Eléanore, André, Boris & les autres, Merci...